Perspectives

J'entends parfois certains photographes recommander de ne shooter qu'aux meilleures heures de la journée, le matin ou en fin d'après-midi, afin de profiter de la plus belle lumière. S'il est effectivement compliqué de photographier en milieu de journée sous un soleil zénithal, il serait cependant dommage de se priver d'une grande partie de la journée où il est tout à fait possible d'obtenir une très belle lumière pour du portrait, à condition de choisir avec soin le lieu de pose.

L'emplacement idéal dans ces conditions est une zone ombragée, à l'abri des rayons directs du soleil, où le modèle est éclairé de façon uniforme par une lumière indirecte, réfléchie et diffusée par l'environnement. Cela peut être un trottoir à l'ombre d'un immeuble, un porche d'entrée, une allée passant sous une passerelle ou un pont, etc. Les photographes anglophones utilisent le terme « open shade », parfois maladroitement traduit en français par « ombre ouverte », à défaut d'une expression plus appropriée.

Toutes les photos illustrant cet article ont été prises au même endroit. J'ai photographié Tania à l'ombre d'une passerelle traversant le parc où nous nous trouvions. La lumière y est très douce et uniforme et garde cependant une certaine directionnalité. Un ciel couvert aurait fourni une lumière tout aussi douce mais également plus fade, car non directionnelle.

Un portrait visuellement intéressant n'est que très rarement le fruit du hasard ou d'un accident. Il nécessite préparation et attention aux moindres détails. Même les portraits qui semblent les plus naturels et les moins posés sont souvent mis en scène par le choix d'un arrière-plan, des éléments qui le composent ou qu'on prendra soin d'exclure du cadre, de la pose et d'éventuels accessoires. Une fois ces éléments déterminés, le modèle est alors libre d'évoluer et de proposer des expressions et attitudes révélatrices de sa personnalité.

Il n'y a pas de règle absolue et universelle déterminant ce qu'il faut inclure ou exclure du cadre de la photo. Un arrière-plan sera choisi en fonction de son contenu, de ses couleurs dominantes, de sa texture, de sa distance par rapport au sujet et de son orientation par rapport à la lumière. Certains photographes ne se préoccupent que du sujet et oublient totalement l'arrière-plan devant lequel ils le photographient. Choisir (ou tout au moins surveiller) son arrière-plan permet d'éviter les poteaux ou palmiers qui poussent de la tête du modèle, d'exclure du cadre certains éléments qui pourraient attirer l'oeil et le détourner du sujet principal, mais avant tout ce choix permet de poser l'ambiance et le contexte de la photo.

Pour le portrait en tête d'article, pris dans un parc du quartier de Bercy, j'ai proposé à Isabelle de s'adosser contre un préfabriqué dont les parois extérieures sont plaquées de panneaux de bois. Le choix de l'angle et de la perspective crée une ligne de fuite intéressante et la profondeur de champ limitée renforce la présence du modèle. Quelques salissures sur les panneaux de bois ont été nettoyées en post-traitement afin de ne pas distraire le regard. Pour la petite histoire, ce préfabriqué abrite en fait les toilettes publiques du parc. Comme quoi il est possible d'utiliser avantageusement toute sorte de mobilier urbain, même le moins glamour !

En avant-première exclusive, une des photos retenues pour la promotion du nouvel album de Louisette, "Chifferini Queen", dont la sortie officielle est prévue dès la rentrée prochaine.

Just for fun…

Ambiance conviviale et décontractée pour cette séance de prise de vues en extérieur qui avait pour but d'illustrer les différentes facettes d'un vêtement créé par Laetitia. Cinq modèles portant toutes la même robe mais dans des styles assez différents, mis en valeur par quelques accessoires vestimentaires. Une simple chaise pour varier les poses et comme décor les fresques et grafittis colorés ornant le mur d'enceinte d'un ancien dépôt de bus à l'abandon.

Et nous voilà partis pour une longue séance sous un soleil de plomb zénithal. Difficile dans ces conditions de trouver une zone ombragée avec une lumière diffuse moins brutale que la lumière directe du soleil. Il a fallu compenser et déboucher les ombres. Mon petit réflecteur, utilisé à une distance suffisante pour pouvoir cadrer en plan large, a vite montré ses limites et a été remplacé avantageusement par un flash déporté.

Pour du portrait pur, cette qualité de lumière aurait été bien trop dure, mais pour des photos de mode / catalogue, elle donne aux images un petit côté "edgy", avec des ombres bien définies, qui colle assez bien avec le décor typé street-art. Un style d'éclairage qui ne m'est pas habituel mais qui me plaît finalement plutôt bien.

Une séance de portraits avec comme décor les rues, quais et ponts du quartier latin. Anne, une amie qui n'avait jamais posé auparavant pour un photographe, a gentiment accepté de jouer les modèles devant mon objectif. Le but n'était pas de photographier le centre de Paris mais bel et bien de réaliser quelques jolis portraits en utilisant le décor urbain en toile de fond.

Malgré quelques hésitations bien naturelles en début de séance, Anne s'est assez rapidement prise au jeu, à tel point que certains passants ont jugé opportun de la prendre en photo en pleine séance de pose (on ne sait jamais, au cas où il s'agirait d'une célébrité…). Le début de la gloire, en quelque sorte !

Cette séance a été l'occasion pour moi d'expérimenter quelques techniques d'ajout d'éclairage artificiel en ambiance naturelle. Un flash portatif déporté, direct ou dans une boite à lumière et un simple réflecteur argent/doré ont été utilisés en complément de la lumière ambiante pour déboucher les ombres ou en tant que source principale d'éclairage. Sans oublier toutefois de profiter en fin de séance de la belle lumière naturelle de fin de journée.

Il y a des façons plus désagréables de finir le printemps !